EKM Avocat
Droit du travail

Cabinet d'avocat en droit du travail et de la sécurité sociale - Alpes-Maritimes (06) et Var (83) 

Plus de 15 ans d'expertise en droit du travail et en droit de la sécurité sociale

Un choc psychologique suite à un entretien choquant avec son patron est-il un accident du travail ?


Qu'est-ce qu'un accident du travail ?

Définition légale

L'accident du travail est défini par l'article L.411-1 du Code de la sécurité sociale comme :

"Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise."

Les deux conditions à remplir

Un accident du travail est donc un événement soudain et qui se produit dans le cadre du travail.

Pour être pris en charge au titre de la législation des accidents du travail, deux conditions doivent être réunies :

1/ Le fait accidentel doit avoir lieu dans le cadre de l’activité professionnelle de la victime;

2/ L’accident entraîne une lésion soudaine.

La présomption d'imputabilité de l'accident du travail

L'accident survenu dans le cadre du travail et qui a entrainé une lésion (physique ou psychique), est automatiquement reconnu comme un accident du travail.

On parle alors de la présomption d'imputabilité de l'accident du travail.

Cela signifie que le salarié n'a pas à rapporter la preuve du lien de causalité entre son accident et le contexte professionnel.

Si la CPAM refuse de reconnaitre l'accident en accident du travail, il lui appartient de prouver que la lésion subie par le salarié est étrangère au travail. 

Comment déclarer un accident du travail ?

Concrètement, un salarié victime d'un accident du travail doit obligatoirement  :

 

  • faire immédiatement constater sa lésion physique et/ou psychique par un médecin  ;

​​​​​​​

  • informer par écrit son employeur de l'accident et lui demander de procéder à la déclaration de son accident du travail.

Il s'agit d'une obligation légale pour votre employeur. L'employeur ne peut pas se faire juge du bien-fondé de la déclaration et du caractère professionnel ou non de votre accident du travail et refuser de procéder à la déclaration de l'accident.

Dès qu’il est informé de l’accident, l'employeur doit procéder, dans les 48 heures, à la déclaration d’accident, quitte à émettre des réserves motivées s’il n’est pas d’accord avec le caractère professionnel de l’accident.

A noter que l’absence de déclaration ou la déclaration tardive expose votre employeur à des sanctions pénales et civiles.

Que faire si votre employeur refuse de procéder à la déclaration de votre accident du travail ? 

Si votre employeur ne procède pas à la déclaration, vous pouvez pallier à sa carence en déclarant vous même votre accident auprès de la C.P.A.M.

Vous avez 2 ans pour le faire.

La reconnaissance d'un accident du travail suite à un entretien choquant avec son employeur

En pratique, les chocs physiques (ex : tomber de son camion, chuter dans les escaliers, …) sont admis plus facilement par les Caisses que les chocs psychologiques, pour lesquels, en pratique, un refus est souvent opposé.

La jurisprudence reconnait le choc psychologique comme un accident du travail

La jurisprudence est claire et constante à ce sujet.

Régulièrement, la Cour de cassation rappelle que tout choc ou malaise arrivé sur le lieu du travail, à condition évidemment qu’une lésion psychologique soit médicalement constatée, doit être reconnu comme accident du travail.

(Cass.civ. 2ème 04 mai 2017 n°15.29411; Cass. civ. 2ème, 29 mai 2019, n° 18-16.183 ; Cass. civ. 2ème, 9 septembre 2021, n° 19-25.418).

Plus récemment, le 23 juin 2023, la Cour d’appel de ROUEN a reconnu l'accident du travail de la salariée qui avait subi un choc émotionnel après un entretien avec son manager.

La décision de la Cour d'appel de Rouen

Les faits

Une salariée qui occupe le poste de conseillère clientèle est convoquée de manière informelle par son Directeur des ventes et par sa Directrice des relations sociales.

Au cours de cet entretien, il est reproché à la salariée d'avoir divulgué le contenu des entretiens de salariés menés dans le cadre d’une enquête concernant une situation de risques psychosociaux.

A l'issue de cet entretien, la salariée appelle immédiatement à l'aide une collègue déléguée syndicale qui s'est rendue à l'agence où travaille la salariée pour s'entretenir avec cette dernière et la Directrice des relations sociales.

En pleurs au cours de ce 2nd entretien, la salariée a été conduite à la Médecine du travail qui a constaté un état de choc émotionnel.

Refus de la C.P.A.M et du Tribunal judiciaire

La C.P.A.M puis le Tribunal Judiciaire de Rouen refusent pourtant de caractériser l'état de choc émotionnel comme un accident du travail aux motifs notamment que l’état psychologique de la salariée résultait d’une accumulation de faits répétés sur plusieurs années. Il n'y avait donc pas de lésion soudaine.

Victoire devant la Cour d'appel !

La Cour d’appel de Rouen ne partage pas le même avis que la C.P.A.M et le Tribunal judiciaire.

Elle estime qu'il s'agit d'un accident du travail après avoir relevé que :

  • il n'est pas contesté que des reproches ont été faits à la salariée à l’issue de l’entretien qui s’est déroulé avec sa direction en fin de matinée, reproches qui l’ont perturbée et l’ont amenée à contacter immédiatement une collègue déléguée syndicale ;
  • un état de choc émotionnel (pleurs, spasmes, tachycardie) a été constaté à l’issue du 2nd entretien, qui s'est tenu après le même jour, la pause déjeuner destiné à évoquer ce qui s’était passé le matin et une lésion a été médicalement constatée le jour même ;
  • peu importe que la salariée fasse état d’une situation difficile au travail puisque l’existence d’un fait soudain aux temps et lieu du travail, ayant provoqué une lésion, est établie.

Quel est l'intérêt du salarié de voir son choc psychologique reconnu en accident du travail ?

Des indemnités majorées et une protection contre le licenciement

 

 

 

Le salarié a tout intérêt à voir reconnaitre son accident en accident du travail et ce, pour plusieurs raisons  :

  • en premier lieu, en cas d'accident du travail, le salarié en arrêt de travail percevra des indemnités journalières de la sécurité sociale majorées ;
  • en deuxième lieu, à l'issue de son arrêt de travail, les séquelles du salarié seront évaluées par le médecin conseil de la CPAM et pourront être indemnisées par la CPAM par le versement au profit du salarié d'une indemnité versée soit sous forme de capital (si IPP < 10%), soit sous forme de rente (si IPP > 10%);
  • en troisième lieu, le salarié pourra rechercher la responsabilité de son employeur et obtenir une indemnisation supplémentaire en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
  • en quatrième lieu, le salarié sera protégé pendant toute la durée de la suspension de son contrat de travail contre un éventuel licenciement de la part de son employeur  (sauf faute grave qui aurait été commise par le salarié avant l'accident du travail  et sauf cas de force majeure);
  • en cinquième lieu, en cas d'inaptitude avec dispense de reclassement, constatée par le Médecin du travail à l'issue de la visite médicale de reprise, le salarié bénéficiera d'une indemnité temporaire d'inaptitude dans l'attente de son licenciement pour inaptitude ;
  • en sixième lieu, le licenciement pour inaptitude qui fait suite à un accident du travail ouvrira droit au profit du salarié au paiement d'une indemnité équivalente à son indemnité de préavis et à une indemnité spéciale de licenciement équivalente au double de l'indemnité légale de licenciement.

Des questions ? Besoin d'un accompagnement ?

Me Elodie MOINE peut vous aider à obtenir la reconnaissance de votre choc psychologique en accident du travail. 


Derniers articles

Enceinte, mon employeur a-t-il le droit de me licencier ?

Un salarié peut-il être licencié pour avoir dénoncé le harcèlement dont il estimait être victime ?

Succès de Me MOINE : Un employeur condamné à payer 12 mois de salaires à titre de dommages et intérêts à une salariée licenciée en raison de son arrêt maladie

Catégories

Réalisation & référencement Simplébo

Connexion