Jurisprudence en droit social - Janvier, février et mars 2020
- Requalification du statut de travailleur indépendant en statut de salarié
Un chauffeur VTC est lié par un contrat de travail à la société utilisant une plateforme numérique et une application afin de mettre en relation avec des clients, en vue d’un transport urbain, des chauffeurs VTC exerçant leur activité sous un statut d’indépendant, s’il est établi que la société lui a adressé des directives, en a contrôlé l’exécution et a exercé un pouvoir de sanction. Dès lors, son statut de travail indépendant est fictif.
Cass. soc, 4 mars 2020, n°19-13.316, Sté Uber France c/ X.
- Exécution du contrat de travail : obligation de loyauté et arrêt de travail
L’exercice d’une activité professionnelle, pour le compte d’une société non-concurrente de celle de l’employeur, pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt. Dans un tel cas, pour fonder un licenciement, l’acte commis par la salariée durant la suspension du contrat de travail doit causer préjudice à l’employeur ou à l’entreprise. Ce préjudice ne saurait résulter du seul paiement par l’employeur des indemnités complémentaires aux IJSS.
Cass. soc, 26 février 2020, n°18-10.017, H. c/ Sté Madison Diamonds
- Contentieux prud'homal : preuve des heures supplémentaires
En cas de litige relatif au paiement d’heures supplémentaires, la preuve des heures supplémentaires ne peut reposer sur le seul salarié. En effet, le salarié doit présenter des éléments suffisamment précis, y compris des décomptes établis de manière unilatérale et a posteriori pour les besoins de la procédure. Etant en charge d’assurer le contrôle des heures de travail qu’effectuent ses salariés, l’employeur doit être de son côté en mesure de fournir les documents de contrôle qui lui incombe. Dès lors c’est à tort que la Cour d’appel a rejeté la demande de paiement d’heures supplémentaires du salarié estimant celle-ci insuffisamment étayée, sans même que l’employeur ait eu à fournir ses propres éléments de réponse.
Cass. soc, 18 mars 2020, n°18-10.919, Monsieur A. X c/ société Galtier expertises techniques immobilières (GETI)
- Rupture du contrat de travail : les sms et/ou les conversations facebook relevant d'une conversation privée ne peuvent légitimer un licenciement
Ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse le licenciement d'une coiffeuse fondé sur des textos qu'elle a échangés avec une collègue et des extraits de son compte Facebook, bien qu'ils comportent des propos ouvertement péjoratifs et insultants à l'égard du gérant du salon, de l'entreprise ou de certains salariés.
En effet, les textos, qui avaient été envoyés à un seul destinataire à partir de la ligne téléphonique personnelle de l'intéressée, relevaient d'une conversation purement privée dont l'employeur ne pouvait faire état dans le cadre du licenciement. De même, les extraits du compte Facebook étaient des échanges privés, manifestement dans le cadre d'un groupe restreint de correspondants, auquel le gérant du salon a eu accès non pas en allant sur le site internet, mais à la suite de la communication, lors d'une réunion, par des salariés.
CA Aix-en-Provence, 14 novembre 2019, n° 17/18277
- Rupture du contrat de travail : résiliation judiciaire du contrat de travail suivi d’un licenciement
Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, il y a lieu de rechercher d'abord si la demande de résiliation du contrat était justifiée et d'apprécier les manquements éventuels de l'employeur, en tenant compte de leur persistance jusqu'au jour du licenciement. La gravité des faits reprochés (en l'espèce des faits de harcèlement moral) s'apprécie non à la date d'introduction de la demande de résiliation judiciaire, mais en fonction de leur persistance jusqu'au jour du licenciement.
CA Aix-en-Provence, 14 février 2020, n°18/03180