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Droit du travail

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Envoyer un sms à connotation sexuelle depuis son portable professionnel à une salariée d'une entreprise cliente relève-t-il de la vie privée ou de la vie professionnelle ?


Rappelons qu'en principe un fait relevant de la vie personnelle du salarié ne peut pas constituer une faute dans les relations de travail.

Par exception, un fait relevant de la vie personnelle du salarié peut justifier une faute si le fait se rattache à la vie professionnelle du salarié ou s'il caractérise un manquement à son obligation découlant de son contrat de travail comme l'a très récemment rappelé la Cour de cassation le 12 juillet dernier.

LES FAITS 

=> En l'espèce, un salarié exerce les fonctions de Chef d'équipe et intervient régulièrement sur le site d'une entreprise cliente  à Marseille.

Le 22 février 2016, la directrice de production industrielle de l'entreprise cliente informe l'employeur du salarié qu'elle refuse tout contact avec ce dernier et qu'elle lui interdit notamment l'accès au site.

Elle explique que depuis plusieurs mois, elle reçoit des SMS à connotation sexuelle de la part du salarié ("sex vous avait un beau cul vraiment" ou encore "t'aime sucer" ou encore " envie de vous, comment faire" et ce, malgré ses demandes d'arrêter un tel comportement.

Le salarié est immédiatement mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable au cours duquel il reconnait les faits.

Le 16 mars 2016, il se voit notifier son licenciement pour faute grave.

LA PROCEDURE 

Le 26 mars 2016, le salarié saisit le Conseil de prud'hommes de MARTIGUES pour contester son licenciement.

=> Le salarié considère en effet que les messages relevaient de sa vie personnelle et qu'ils ne constituaient nullement une faute dans l'exécution de son contrat de travail et ce d'autant plus que la destinataire des messages était salariée d'une autre entreprise. Il verse au débats des témoignages de collègues féminines assurant n'avoir jamais rencontré la moindre difficulté dans leurs relations avec lui.

Le 17 janvier 2018, le Conseil de prud'hommes de MARTIGUES ne suit pas la position du salarié et considère que son licenciement pour faute grave est fondé.

Le 26 janvier 2018, le salarié interjette appel de la décision.

Le 05 février 2021, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence confirme le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de MARTIGUES et condamne le salarié à payer 1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

=> Le salarié forme alors un pourvoi pour les 3 raisons suivantes : 

1/ il rappelle qu'un fait de la vie personnelle du salarié, même s'il occasionne un trouble dans l'entreprise, ne peut justifier un licenciement disciplinaire sauf s'il constitue un manquement de celui-ci à une obligation découlant de son contrat de travail : selon lui, le fait reproché était étranger à ses fonctions de chef d'équipe, relevait de sa vie personnelle et ne constituait pas un manquement à ses obligations professionnelles.

2/ selon lui, il ne résultait aucun préjudice dès lors que la société cliente avait décidé, avant le licenciement du salarié, d'arrêter son activité sur le site sur lequel le salarié était affecté, ce qui mettait un terme à sa mission sur ce site. Pour le salarié, son employeur n'avait donc perdu aucun client et n'avait donc subi aucun préjudice.

3/ selon lui, la faute devait être appréciée in concreto en tenant compte de ses qualités professionnelles et de ses antécédents disciplinaires : en l'espèce, le comportement antérieur était exempt de tout reproche qui avait toujours donné entière satisfaction en près de 20 ans d'ancienneté et avait toujours travaillé consciencieusement pour participer au développement de l'entreprise. 

LA QUESTION POSEE A LA COUR DE CASSATION 

Les propos à caractère sexuel envoyés par un salarié sur le portable professionnel d'une salariée d'une entreprise cliente, avec qui il est en contact exclusivement en raison de son travail, relèvent-ils de la vie personnelle du salarié ? 

LA REPONSE DE LA COUR DE CASSATION 

=> Pour la Cour de cassation "le salarié qui, dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail, s'était trouvé en relation avec une salariée d'une entreprise cliente et avait eu connaissance de ses coordonnées téléphoniques professionnelles dont il avait fait un usage abusif en lui adressant des messages à caractère obscène, a pu en déduire que les propos à caractère sexuel à l'égard de cette salariée, avec laquelle il était en contact exclusivement en raison de son travail, ne relevaient pas de sa vie personnelle." (Cass.soc.12 juillet 2012 n°21-14777°).

La solution aurait-elle été différente si le salarié avait été en contact avec cette salariée y compris dans le cadre de leur vie personnelle ?


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